Le SAT I, grand test nécessaire aux US pour se positionner pour les études supérieures a vécu : sa forte corrélation avec le QI l’a tué. Il va être remplacé en 2005 par le SAT II, lequel fait plus appel aux connaissances, et moins au potentiel.
En 1994, Herrnstein & Murray avaient montré que le QI est un discriminant de plus en plus important dans les sociétés modernes, et que cela est du à un certain nombre de critères dont la complexification de la société en elle-même, et surtout la démocratisation de l’enseignement [1]. Certains, opposés à cette approche, considèrent qu’une bonne part de cette pré-éminence du QI est due au SAT en lui-même. Leur raisonnement est le suivant : puisque le succès professionnel dépend des études effectuées, et que celles-ci, via le SAT, sont construite autour du QI, alors il suffit de changer le SAT par un test ayant moins de corrélation avec le QI (un test de connaissances) pour que la corrélation succès-QI baisse auto-ma-ti-que-ment. Cela peut-il marcher ?
Tout d’abord il serait malvenu d’ironiser en proposant d’utiliser des critères encore moins corrélés avec le QI, comme par exemple la couleur des cheveux, ou celle de la peau. Il est en effet trop tard pour se moquer : c’est déjà en place (la majorité des universités américaines ont mis en place des procédés pour que les ressortissants de certaines minorités soient avantagés : c’est le principe de l’Affirmative Action). La question à se poser est plutôt : est-ce que ça va changer quelque-chose ?
On peut imaginer un système dictatorial dans lequel l’élite est définie par des critères arbitraires (= choisis et imposés). Dans ce système, il serait probablement facile de faire corréler très fortement ce critère avec le succès social. Par exemple, en imposant que seuls les blonds ont le droit d’occuper des postes de cadres ou, plus fréquent, que les femmes n’ont pas le droit au moindre pouvoir, la corrélation QI/succès sera restreinte. Mais sommes-nous dans un tel système dictatorial ? Le choix des cadres n’est pas imposé par l’état, mais extraordinairement décentralisé : il se situe au niveau des entreprises. Des études ont trouvé que le QI est le meilleur prédicteur de compétence professionnelle [2] : les recruteurs peuvent donc considérer avoir tout intérêt à l’utiliser. Avec le système actuel, il y a une corrélation entre le QI et le type d’études poursuivies, grâce au SAT. Ces dernières sont donc un proxy du QI, et le recruteur qui recrute un diplomé Harvard ou MIT n’a pas besoin de tester son QI. Bien sûr, si cette corrélation études/QI baisse, alors les recruteurs se fondant sur le QI devront s’adapter, et mettre en place d’autres filtres.
Une autre limitation est la corrélation entre les connaissances et le QI. Celle-ci n’est bien sûr pas parfaite, mais un QI plus haut permettant une meilleure mémorisation et intégration de l’information, il y a des chances que ce seraient partiellement les mêmes qui seraient sélectionnés par le nouveau test. Pour atteindre son objectif, il faut donc que le SAT II ait été construit spécifiquement pour avoir une corrélation plus faible avec le QI (par exemple en ne testant que certaines connaissances).
Un article de News USA [3] fait assez bien le point sur les arguments en faveur de ce changement. L’argument le plus solide me semble être qu’une modification du test obligera les écoles qui entraînent au test à changer leur programme, et celui-ci pourra peut-être correspondre à une éducation plus riche et plus complète.
- Voir sur Douance : Review de "The Bell Curve" (Herrnstein & Murray)
- Hunter & Hunter, 1984. Voir sur Douance : Statistiques sur le QI
- The SAT Revolution. The new test spells the end of IQ-and big changes for American education. By Julian E. Barnes, News USA, Cover Story 11/11/02
- Le SAT selon PBS