Selon Shan Guisinger [1], l’anorexie mentale serait explicable par les migrations humaines au cours des 11.000 dernières années.
Elle considère que le fait que l’anorexie soit aussi semblable chez toutes les personnes atteintes montre qu’il s’agit d’une maladie biologique, et pas psychologique. De plus, parmi ces caractéristiques communes, on trouve à la fois la très forte réduction des besoins alimentaires, mais aussi un haut niveau d’activité, et une chute de la fertilité, toutes choses particulièrement utiles lors de grandes migrations. Aussi, elle appelle son hypothèse : ’Adapted to Flee Hypothesis’ (Adaptation à la fuite).
Un avantage de cette hypothèse est qu’elle explique bien pourquoi l’anorexie est une maladie qui peut être déclenchée par le comportement : un régime alimentaire particulièrement strict pourra, chez certaines personnes génétiquement prédisposées, provoquer cette anorexie. On retrouve là les conditions d’une fuite (ou migration) : les personnes en déplacement ne peuvent plus manger, et le programme de secours que constitue l’anorexie se met alors en fonctionnement, à partir d’un certain seuil de perte de poids. Cette hypothèse ne semble cependant pas expliquer le lien entre l’anorexie et la boulimie.
D’autres hypothèses avaient été proposées, comme celle de la Suppression de la reproduction (Reproduction Suppression Hypothesis), proposée entre autres par le Professeur Crawford [2]. L’idée est que l’enfantement est tellement coûteux pour la femme qu’il peut être adaptatif dans certains cas de le retarder.
Quoiqu’il en soit, l’origine biologique de l’anorexie semble ne plus faire beaucoup de doute, ce qui signifie que les approches purement psychologiques ne peuvent suffire à résoudre le problème : le patient n’a pas la volonté de ne pas manger, mais souffre d’une perturbation de son système de gestion de la faim qui lui impose de ne pas manger. En conséquence, le seul moyen de le traiter est de l’y forcer, et de ne surtout pas l’inciter à écouter ce que lui demande son corps… puisque celui-ci lui envoie des informations faussées.
Notes :
[1] The ancestry of anorexia : Blame biology, not parenting, new theory suggests By Ellen Ruppel Shell, Globe Correspondent, 12/30/2003